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Refus par un maire d’inscrire un élève à la cantine scolaire, faute de places disponibles: le Conseil d’État a tranché.

Par un arrêt rendu le 22 mars 2021, le Conseil d’État a définitivement tranché la question de savoir si une commune pouvait refuser l’accueil d’un élève à la cantine scolaire, en raison d’un manque de place (CE, 22 mars 2021, req. n° 429361).

À rebours de ce qu’avaient décidé le Tribunal administratif de Besançon puis la Cour administrative d’appel de Nancy, la plus haute juridiction administrative française a jugé qu’une commune peut légalement refuser l’inscription d’un élève à la cantine scolaire au motif que la capacité maximale d’accueil de ce service est atteinte.

Les faits à l’origine de l’affaire et la procédure

Mme A., mère d’un enfant scolarisé dans une école primaire de Besançon, avait demandé l’inscription de son fils au service de restauration organisé par la commune. Invoquant un manque de place dans ledit service de cantine scolaire, le maire de Besançon a opposé un refus à Mme A. Ce dernier lui a par ailleurs précisé que sa demande serait réexaminée au gré de la fréquentation dudit service.

Saisi par Mme A., le Tribunal administratif de Besançon a prononcé l’annulation de la décision de refus opposée par le maire. La commune de Besançon a alors interjeté appel devant la Cour administrative d’appel de Nancy, laquelle a confirmé le jugement rendu en première instance.

La commune de Besançon se pourvoit alors en cassation devant le Conseil d’État, afin de faire reconnaître la légalité de la décision de refus opposée à l’inscription d’un élève au service de cantine scolaire, faute de place disponible.

L’arrêt rendu par le Conseil d’État

Le Conseil d’État se fonde sur la loi « Égalité et citoyenneté » du 27 janvier 2017 (Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté) qui insère un nouvel article L. 131-13 dans le Code de l’éducation, qui dispose que : « L’inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille ».

Selon la haute juridiction administrative, il en résulte que s’il « appartient aux collectivités territoriales ayant fait le choix d’instituer un service public de restauration scolaire de prendre en compte l’intérêt général qui s’attache à ce que tous les élèves puissent bénéficier de ce service public, d’autre part, qu’elles ne peuvent légalement refuser d’y admettre un élève sur le fondement de considérations contraires au principe d’égalité« , ces dispositions ne s’opposent pas à ce qu’une commune refuse d’admettre un élève à la cantine scolaire dans le cas où la capacité maximale d’accueil de ce service public de restauration scolaire est atteinte.

L’arrêt rendu par la Cour administrative d’appel de Nancy, qui avait confirmé le jugement rendu par le Tribunal administratif retenant la solution inverse, est alors annulé. Les juges du fond avaient en effet retenu une interprétation large de l’article L. 131-13 du Code de l’éducation, en considérant que ce dernier imposait aux collectivités de garantir le droit à l’inscription à la cantine à tout enfant scolarisé qui en fait la demande (TA Besançon, 7 déc. 2017, n° 1701724 et CAA Nancy, 5 fév. 2019, n° 18NC00237).

Les sages du Conseil d’État ont donc entendu les difficultés soulevées par le maire de Besançon, qui invoquait « la capacité d’accueil limitée » dans les cantines de la commune, ainsi que les risques « en termes de sécurité et d’encadrement des enfants » que ferait peser une obligation générale d’accueil.

L’arrêt rendu par le Conseil d’État a ainsi le mérite du pragmatisme, dès lors qu’il prend en compte les contraintes, souvent complexes, auxquelles sont confrontées les communes. Ces dernières peuvent en effet souhaiter offrir à leurs administrés un service public de restauration scolaire, sans pour autant avoir les moyens suffisants pour garantir l’accueil de tous les enfants scolarisés.